Résilience de Julia M.Tean

Année d'édition : 2016
Edition : rebelle
Nombre de pages : 147
Public visé : Adulte
Quatrième de couverture :
Pour ses dix-neuf ans, Vincent s’est offert un parricide. Il a tué son bourreau. Mais peut-on vraiment se libérer de l’emprise du Mal ? Peut-on se reconstruire après avoir subi le pire ? Incarcéré, Vincent doit affronter ses démons, apprendre à se connaître et s’accepter… pour atteindre la délivrance, sa résilience.

La première page :

 Mon avis :


Vincent a commis ce qu'il espérait être sa délivrance : il a enfin sauté le pas et tué cet homme qui lui a donné la vie. Un père ? Non, Franck n'avait rien d'un père ni son épouse d'une mère. Et Vincent avait besoin de se délivrer de son bourreau, de goûter à la liberté. Lorsqu'il a commis ce geste de désespoir il en acceptait la suite : la prison, le jugement, le regard des autres. Mais sa prison finalement devient un peu sa liberté, celle de comprendre enfin qui il est au fond de lui...

Résilience est une claque magistrale. L'auteur parvient à nous proposer un portrait unique, celui de Vincent, frêle garçons, malade qui plus est. Un sac de frappe sur jambe pour son père, Franck, homme violent, raciste et homophobe qui ne semble avoir aucune once d'amour en lui. Être humain détestable et antipathique que ce Franck, le véritable monstre, celui qui fait de notre héros cet être chétif et craintif qui ne sait pas que les émotions et les sentiments sont beaux peu importe la sexualité ou la religion.

Ce roman est un coup de poing sur la tolérance et l'acceptation de soi. Vincent, si malheureux si triste si effacé. Pauvre victime d'une famille qui n'accepte pas sa maladie, sa différence, cri déchirant d'un enfant qui n'espère qu'une chose avoir une famille, une vraie où on lui offre un peu de chaleur, de réconfort et surtout de l'estime concernant sa personne et son être. Pfiou j'ai ressenti tellement d'empathie pour Vincent. Je pardonnais chacun de ses gestes, chacune de ses décisions, les bonnes comme les moins bonnes. J'avais autant la haine que lui de voir tout ce qu'il subissait que ce soit avec son père ou en prison. Pauvre âme errante qui ne fait que subir la violence des autres sous prétexte qu'il paraît plus faible et différent...

«  Bordel de merde ! Ca ne va pas recommencer ! Beugle la mère.
Hurler n'y changera rien. Vincent n'arrive plus à respirer normalement. Couché sur le tapis du salon, il halète en serrant les poings. Il est plus de minuit. Le dernier client enfile sa chemise en dévisageant la prostituée qui secoue le corps fébrile de son fils.
- Eh toi, tu pars pas sans payer ! Braille-t-elle alors que le client pousse la porte d'entrée.
Il se retourne et lui adresse un doigt d'honneur.
- Je n'ai pas eu le temps de jouir avec tes conneries. Occupe-toi de ton gosse mère indigne !
Page 35.

Parce que oui en plus d'un père violent et dangereux, Vincent n'a pour mère qu'une prostituée qui ne s'occupe jamais de lui trop occuper à écarter les jambes pour un peu d'argent. J'ai eu honte de cette femme dégueulasse et exécrable. L'envie de lui ôter à jamais toute envie d'avoir des relations sexuelles. Le dégoût pour cette femme était profond, déstabilisant. Une femme qui finalement n'a pas une once de maternité pour son fils et préfère que ce soit lui qui se fasse tabasser à sa place comme en témoigne ce triste passage :

«  Elle soupire dans l'ambulance. Elle sait ce qui l'attend. Il va la frapper et il va la baiser. Violemment. Il va la faire souffrir parce que la gosse ne sera pas là pour lui servir de punching-ball. »
Page 36.

Vous voyez un peu le topo ? Et on s'étonne qu'un tel enfant finisse par tuer son bourreau... Mon pauvre Vincent que j'ai eu mal au cœur pour lui, pour ses souffrances, son mal-être, sa maladie, son rejet de sa sexualité...Il tentera le tout pour le tout pour qu'une fois enfin son père soit fier de lui, mais peine perdue et l'enfant s'enfonce dans un cercle de plus en plus violent. Il agresse des gens dans la rue avec une bande de skinhead dans le seul but d'être enfin quelqu'un de puissant qui ne s'écrase plus. Que j'ai eu mal au coeur de le voir se venger ainsi sur des arabes et des homosexuels pour faire comme les autres. 

Je ne suis pas une lectrice sensible, loin de là. Avec tout ce que j'ai lu depuis tant d'années j'ai vu des monstres défiler dans les pages de mes lectures. J'ai vu des victimes réduites à de simples pantins à peine vivants. Mais jamais, je n'avais rencontré quelqu'un comme Vincent. Et pourtant il a des similitudes avec Kimy dans les Démoniaques que j'ai chroniqué plus tôt. Plus de similitudes qu'on ne le croit d'ailleurs en y repensant. Un garçon touchant qu'on apprécie de suite et qu'on veut aider, apaiser tout comme tenteront de le faire à la fois Pedro, Yassir ou encore Mélissa. Des gens bons, des lueurs d'espoirs pour ce jeune garçon qui n'aura connu que haine, violence, déchainement de rage et de coups sur son corps frêle... Pauvre Vincent.

On vit l'histoire de Vincent à deux époques différentes. Celle de son apprentissage de la violence lorsqu'il n'est qu'un enfant et qu'il trouve enfin une échappatoire à ce qui lui sert de famille et Vincent majeur après qu'il ait tué son géniteur. Oui géniteur, il ne mérite absolument pas le titre de "père". Mais voilà c'est une fois qu'il a activé la machine de la vengeance que les gens commencent à comprendre ce garçon si effacé et surtout si amorphe, sans émotion. Son besoin d'extérioriser par la violence tout ce qu'il gardait enfoui en lui comme une bombe à retardement... de la dynamite pure entourée de chair et enrobée d'os et de sang... 

Et plus on avance dans l'histoire de ce jeune homme qui se découvre enfin un don et une passion plus on pressent le pire qui hélas arrive subitement sans crier gare... Je n'imaginais pas un tel final aussi intense. L'auteur a su choisir les mots, efficaces et sobres pour nous faire nous sentir au plus mal. Oui les larmes n'étaient pas loin et c'est bien la première fois que je ressens tant d'émotions avec un livre si court, si rapide à lire et si addictif.

Sur ces quelques lignes (oui j'ai fais court pour cette chronique) je vous laisse découvrir par vous-même ce roman puissant et dont les thèmes sont magnifiques et me sont chers. Si vous êtes sensibles, trop sensibles prévoyez les mouchoirs et venez faire la rencontre de Vincent, cet être magnifique, qui tel un cygne prendra son envol espérant un avenir meilleur. Julia ne m'avait pas menti ce roman est fort en émotion !

Les plus :
- la plume qui reste sobre et douce pour se révéler très efficace.
- la psychologie des personnages très bien développé en si peu de pages.
- Les thèmes abordés par l'auteur, puissants et d'actualités.

Les moins :
- Peut-être à éviter si vous n'aimez pas les romans tristes, sombres, si vous êtes trop fragiles psychologiquement. 



Commentaires

  1. Je pense que c'est une lecture qui me plairait, même si c'est un peu bizarre de dire ça comme ça.

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    1. non ce n'est pas bizarre, le roman intrigue et plaît malgré sa thématique difficile !

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  2. Un gros coup de coeur que ce livre.
    Je compte bien découvrir d'autres titres de l'auteur. Et toi ?

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    1. oui je pense me pencher à l'occasion sur lune rouge ^^

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  3. Ce post sur la colère est infiniment calme et dépourvu de la moindre ironie. C'est sobre et sensible.
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